Lorsqu’on doit réaliser un test d’intrusion, une question revient systématiquement : quelle méthodologie utiliser ? Et derrière ce choix se cache un enjeu majeur. Une méthodologie, ce n’est pas un “détail technique” réservé aux pentesters : c’est la structure qui va déterminer la qualité du test, sa profondeur, sa pertinence et sa capacité à révéler les vulnérabilités qui comptent réellement. Mais avant d’aller plus loin, rappelons ce dont il n’est pas question ici. Cet article ne traite ni des niveaux d’accès (black box, grey box, white box), ni de la position de l’attaquant (test d’intrusion interne ou externe). Ici, nous parlons d’un autre sujet clé : quelle méthodologie de pentest choisir parmi les guides qui existent (OWASP, PTES, OSSTMM, …) ? Et pourquoi ce choix dépend en réalité du contexte, des risques, du périmètre et de la maturité de l’entreprise.
Pourquoi le choix d’une méthodologie de pentest est stratégique ?
Chaque méthodologie sert un objectif différent
OWASP, PTES, OSSTMM et toute autre framework ne sont pas interchangeables.
Chaque méthodologie a été conçue pour répondre à un objectif :
- OWASP structure l’analyse des applications web et mobiles.
- PTES propose un processus complet, simple et reproductible.
- OSSTMM couvre l’ensemble du périmètre opérationnel : technique, humain, réseau, physique, organisationnel.
Ainsi, choisir un standard revient d’abord à choisir ce que l’on souhaite vraiment évaluer.
Les besoins ne sont pas les mêmes entre une startup, une PME et une ETI
Une startup SaaS exposée sur Internet n’a pas les mêmes risques qu’une PME industrielle dont le SI repose sur un Active Directory vieillissant. Un test orienté sécurité applicative pour l’une ne sera pas suffisant pour l’autre.
Le choix de la méthodologie dépend donc directement du contexte métier, du niveau de maturité et surtout de la surface d’attaque de l’entreprise.
Une méthodologie non adaptée = un test à faible valeur
Un test d’intrusion inadapté, même bien réalisé, ne fournit pas la valeur attendue.
Par exemple :
- utiliser OWASP pour un audit réseau laisse des pans entiers non testés,
- utiliser OSSTMM pour un simple test applicatif est disproportionné,
- utiliser PTES pour un périmètre purement organisationnel n’a que peu de sens.
D’où l’importance d’une méthodologie rigoureuse et cohérente avec le périmètre défini. Pour aller plus loin sur les standards, l’article dédié aux différentes méthodologies de pentest détaille chaque cadre reconnu.
OWASP, PTES, OSSTMM : comparaison des approches
OWASP : l’approche la plus adaptée aux tests applicatifs
OWASP est la référence mondiale pour tester la sécurité des applications web et API. Son Testing Guide fournit une liste exhaustive de tests liés à l’authentification, aux sessions, aux injections, aux accès sensibles, à la logique métier ou encore à la sécurité des API.
Pour un SaaS, une plateforme web, une application mobile ou un produit numérique, OWASP constitue l’approche la plus pertinente.
Plus encore, le OWASP Top 10 reste le socle minimal de compréhension des risques applicatifs. C’est la méthodologie la plus “pratique” pour les startups tech, les produits en ligne et les équipes orientées développement.
PTES : le standard le plus équilibré et pédagogique
Le PTES (Penetration Testing Execution Standard) structure un test d’intrusion en étapes successives, allant du cadrage initial à la restitution finale.
Sa force réside dans sa clarté : chacun comprend ce que le pentester va faire, quand et pourquoi.
Pour les entreprises qui veulent un pentest global — sans entrer dans un cadre trop imposant — PTES reste la meilleure base. Il convient particulièrement bien aux startups et PME qui veulent un test fiable, exhaustif mais lisible.
C’est également l’approche la plus fréquemment utilisée par les experts en tests d’intrusion souhaitant fournir un rapport clair et actionnable.
OSSTMM : la méthodologie la plus exhaustive
OSSTMM adopte une vision scientifique et opérationnelle du pentest. Elle couvre l’ensemble des couches de sécurité :
- réseau,
- systèmes,
- humains,
- physique,
- processus opérationnels.
C’est la méthodologie la plus exigeante, la plus complète, mais aussi la plus lourde. Elle est très pertinente pour les organisations ayant un SI complexe, hybride ou multisite.
Une PME industrielle, une entreprise avec une forte dette technique ou une ETI avec un périmètre large pourront tirer une valeur considérable de l’approche OSSTMM.
Startups et PME : comment choisir la bonne méthodologie de pentest ?
Identifier la menace principale selon votre structure
Les startups sont majoritairement exposées aux attaques applicatives : injections, mauvaises configurations cloud, compromission d’identifiants, défauts d’authentification.
Les PME, elles, sont souvent victimes de ransomwares, de phishing avancé ou de compromissions internes liées à des services exposés ou mal configurés.
Comprendre vos risques et votre surface d’attaque
Une startup doit prioriser la sécurité de son produit web et de ses API. OWASP est donc généralement la première brique.
Une PME, en revanche, doit analyser l’exposition réseau, les accès internes, les habilitations, les serveurs, les configurations… PTES ou OSSTMM deviennent alors plus adaptés.
Ce choix dépend aussi de ce que vous avez déjà cartographié ou non (comptes, services, flux).
Quel budget cybersécurité pour une petite entreprise ?
Un pentest représente un investissement, mais nettement inférieur au coût moyen d’une cyberattaque.
On observe généralement :
- 4 à 6 k€ pour un pentest applicatif simple,
- 6 à 10 k€ pour un audit applicatif OWASP complet,
- 10 à 20 k€ pour une approche OSSTMM selon périmètre interne/externe.
Pour une TPE ou PME, la question n’est pas “combien cela coûte ?”, mais “combien coûterait une faille exploitée ?”.
Ce qu’il faut prioriser en premier
Avant même de choisir une méthodologie, l’entreprise doit prioriser trois éléments :
- tout ce qui est exposé sur Internet,
- tout ce qui porte de la donnée sensible,
- tout ce qui sert d’identité (authentification, IAM, comptes administrateurs).
Méthodologie de pentest recommandée selon le cas d’usage
Image par StartupStockPhotos
Pour une startup tech / SaaS / produit web
Pour une startup orientée produit numérique, la surface d’attaque est presque toujours applicative. Le cœur du risque repose sur les API, les flux web, les identités, la gestion des sessions, la logique métier et l’orchestration côté cloud. Dans ce contexte, OWASP constitue la méthodologie la plus pertinente, car elle permet de tester précisément ce qui fait la valeur — et donc la faiblesse potentielle — d’un SaaS.
Les startups évoluent rapidement, modifient leurs fonctionnalités sans cycles longs, et peuvent introduire des vulnérabilités critiques entre deux sprints. Une approche basée sur le OWASP Testing Guide apporte un cadre clair pour auditer chaque composant applicatif au fur et à mesure qu’il évolue.
Cela dit, OWASP reste centré sur l’applicatif. Pour éviter de passer à côté de risques plus larges — postures cloud, configuration réseau, stockage, permissions IAM — il est souvent judicieux de compléter OWASP par PTES. Cette combinaison OWASP + PTES offre un cadre équilibré :
- OWASP pour l’analyse profonde du produit,
- PTES pour vérifier que l’environnement global ne présente pas de déficit structurel.
Pour une PME avec SI interne ou hybride
Les PME disposent rarement d’un environnement « full cloud » construit dès le début. En pratique, leur SI est hybride : serveurs locaux, applications métiers, partage de fichiers, VPN, postes Windows, Active Directory, parfois une GED vieillissante ou un outil métier exposé sans qu’elles en soient pleinement conscientes. Dans ce type d’environnement, PTES est une excellente base.
PTES structure un test d’intrusion de manière simple et claire, ce qui permet de cartographier la surface d’attaque, identifier les services exposés, comprendre les flux internes et tester la robustesse des accès. Il permet d’obtenir une vision complète de la posture technique, sans basculer dans un niveau de détail trop complexe.
Cependant, dès que l’organisation grandit ou que le SI devient plus critique — par exemple, lorsqu’il existe plusieurs sites, de multiples environnements, des prestataires variés ou une forte dépendance au système interne — OSSTMM devient pertinent. Sa vision multidimensionnelle (réseau, physique, humain, process) permet d’obtenir une analyse plus exhaustive, essentielle pour les PME ayant une chaîne opérationnelle sensible ou un fort niveau d’intégration technique.
Pour une PME/ETI à forte sensibilité
Les PME ou ETI avec des contraintes réglementaires, des données sensibles, une exposition internationale ou une architecture complexe ont besoin d’une méthodologie plus robuste et plus transversale. Dans ce cas, OSSTMM prend tout son sens.
OSSTMM ne se contente pas de vérifier si une application ou un serveur est vulnérable. Il évalue l’efficacité globale du dispositif de sécurité :
- configurations,
- segmentation réseau,
- gestion des identités,
- dispositifs physiques,
- procédures internes,
- résilience opérationnelle.
Ce type d’approche est indispensable pour des organisations dont la continuité d’activité est directement liée à leur architecture IT.
Pour autant, OSSTMM ne suffit pas toujours. Une entreprise avec des composants web critiques devra systématiquement ajouter des tests OWASP, afin de garantir une couverture complète du volet applicatif. C’est souvent le cas des ETI disposant d’un portail client, d’un extranet ou de modules API intégrés à leur SI.
Le choix de méthodologie de pentest final dépend avant tout de votre objectif
Avant de choisir, il faut définir ce que l’on veut tester
La méthodologie n’est jamais la première question à résoudre. La mission d’un test d’intrusion n’est pas de suivre un standard “parce qu’il est reconnu”, mais d’apporter une réponse claire à un besoin précis :
- Si l’objectif est de tester une application web, OWASP est presque un choix naturel.
- Si le but est d’évaluer la sécurité interne, PTES ou OSSTMM sont plus adaptés.
- Si l’entreprise veut comprendre sa posture globale, OSSTMM devient indispensable.
- Si le besoin est de tester une surface cloud exposée, une approche mixte OWASP + PTES reste la plus pertinente.
- Sans oublier différents guides et référentiels, parfois construits par les éditeurs, permettant de compléter les approches.
Dans tous les cas, la bonne question est : quelles sont les menaces que je veux simuler ?
Photo de Andras Vas
Un test d’intrusion ne vaut que si son objectif est clair
Un test d’intrusion ne sert à rien s’il ne répond pas à une problématique définie. Trop d’entreprises demandent un “pentest global” sans savoir ce qu’elles veulent mesurer, ce qui conduit à des tests superficiels ou trop génériques.
Définir un objectif — résilience externe, audit applicatif, test interne, validation de conformité, vérification d’hypothèses techniques — est indispensable.
Si vous ne savez pas encore pourquoi réaliser un test d’intrusion, c’est précisément la première étape. Un pentest n’est pas un simple exercice technique : c’est un outil d’aide à la décision.
La méthodologie de pentest n’est qu’un outil : la valeur dépend du cadrage
Même la meilleure méthodologie est inefficace si le test n’est pas correctement cadré. Un pentest pertinent repose sur :
- un périmètre clair,
- une analyse de risques réaliste,
- une maturité cybersécurité connue,
- et une capacité interne à exploiter les résultats.
La méthodologie apporte un cadre, mais c’est le cadrage qui donne sa valeur à la méthode. Un test mal ciblé ou mal préparé révélera forcément moins de failles — ou des failles qui ne sont pas les plus critiques pour l’entreprise.
Choisir une méthodologie de pentest, c’est avant tout choisir une démarche rigoureuse
La vraie question n’est pas “OWASP, PTES ou OSSTMM ?” mais “quelle structure me permettra de ne rien manquer ?”.
OWASP structure la sécurité applicative, PTES offre une approche globale et pédagogique, OSSTMM couvre tout le spectre opérationnel.
Ces méthodologies existent pour garantir que le pentest soit complet, reproductible et rigoureux.
Elles constituent la colonne vertébrale d’un test d’intrusion sérieux et évitent les zones d’ombre. Une entreprise qui s’appuie sur des standards reconnus et clairement identifiés réduit drastiquement le risque de passer à côté d’une faille critique.
En cybersécurité, une méthodologie n’est jamais un simple protocole : c’est la garantie qu’un pentest réalise ce qu’il doit réellement accomplir, sans approximation.
Romain LEFEVRE
Je m'appelle Romain et j'ai rejoint SkillX en octobre 2020 à la suite d'études en Cybersécurité. J'ai choisi SkillX pour ses valeurs de responsabilité, de confiance, d'innovation et de collaboration, mais aussi pour son approche d'entreprise libérée. Pour la Cybersécurité, j'ai une appétence pour les sujets de sensibilisation, de SOC et d'audit de sécurité. En dehors de la sphère professionnelle, je suis un passionné de sport avec comme principale activité le Water-Polo, mais je fais aussi de la natation, de la course à pied et du vélo. Je suis aussi un grand lecteur avec une préférence pour les sujets autour des sciences, de l'Intelligence Économique ou encore de la gestion des données personnelles.